C’est une question que se posent beaucoup d’humains de chats : pourquoi diable mon chat vient-il piquer de la nourriture dans mon assiette, sur le plan de travail de la cuisine, voire directement dans mes placards ? Il est pourtant bien nourri, il a des croquettes et même parfois de la pâtée ou de délicieuses friandises, voire un régime fait maison…
Je vous propose de voir ensemble dans cet article les différentes raisons qui peuvent expliquer ce comportement.
Pourquoi on ne peut pas parler de "vol" ?
Avant toute chose, revenons sur la notion même de «vol» et sur l’emploi de ce terme en réalité inapproprié dans ce contexte.
Car dans le monde du chat, la notion de propriété telle que nous l’entendons ne fait pas sens.
Pour le chat :
Ce qui est à lui est à lui
Ce qui est à vous est à lui
En fait, tout ce qui l’entoure… est à lui !
Plus sérieusement, il faut bien comprendre que pour le chat, votre chez vous est son chez lui, et tout ce qui constitue son environnement est tout simplement pour lui une opportunité de combler un besoin ou de contribuer à son bien-être.
Votre lit ? Un spot de couchage confortable. Votre commode ? Un lieu depuis lequel observer son espace de vie. Votre canapé ? Un support potentiel de griffade. Vos lacets de chaussure ou vos cotons-tiges ? Des jouets avec lesquels s’amuser. Et donc votre table… Une source de nourriture parfois appétissante.
En effet, notre cher chat domestique s’intéresse avant tout à lui-même. Non pas par égoïsme ou par dédain pour l’humanité... 😁 Mais tout simplement parce que tous les animaux – y compris, bien souvent, les humains ! – agissent avant tout pour leur propre survie ou pour leur bien-être, en fonction de leurs besoins et de leur fonctionnement.
Oubliez donc définitivement toute volonté de s’approprier volontairement quelque chose qui vous appartient : si de la nourriture est accessible quelque part, elle est pour votre chat une opportunité de se nourrir.
Elle peut aussi représenter parfois la possibilité de goûter à des aliments qu’il n’a que rarement ou jamais la possibilité de manger.
S’il glisse une patte sous la table pour grapiller une part de pizza ou qu’il saute sur le plan de travail pour grignoter un morceau de votre steak, ça n’est ainsi pas dans l’idée de vous «voler». Pour votre chat, qu’il s’agisse d’un morceau de poulet dans votre assiette ou d’une souris dans le jardin, il s’agit tout simplement d’une occasion à saisir, et il n’y a pour lui aucune notion ou conscience de “vol”.
Mais alors, pourquoi agit-il comme s'il savait qu'il vole ?
On rétorque souvent, lorsqu’on explique ce fonctionnement félin :
«Mais si mon chat ne sait pas qu’il vole, pourquoi agit-il de manière furtive et tente-t-il tout de suite de fuir avec son butin ?».
Comme bien souvent pour tout ce qui peut ressembler à de la culpabilité, et renvoyer à ce qui pourrait laisser croire à une forme de conscience que ce que le chat fait est «mal», il s’agit en réalité d’un comportement adaptatif en lien direct avec vos réactions.
Si à chaque fois que votre chat a tenté de prendre de la nourriture sans votre accord, vous vous êtes empressés de lui arracher de la gueule, ou que vous avez crié, voire que vous l’avez puni, il a appris qu’il avait intérêt à agir rapidement et à s’enfuir.
En outre, n’oublions pas que le chat est un fin prédateur, qui à l’origine chasse pour se nourrir : il aura donc naturellement tendance à agir discrètement et à détaler avec sa prise s’il la sait convoitée ou s’il se sent menacé… Instinct de survie oblige !
Les raisons qui peuvent pousser le chat à manger votre nourriture
1. Les pistes médicales
Tout d’abord, il peut être pertinent de consulter votre vétérinaire pour vous assurer que votre chat ne souffre d’aucune pathologie.
Des troubles digestifs ou des paratistes, occasionnant par exemple une mauvaise assimilation des nutriments, peuvent en effet être l’origine d’une recherche intensive de nourriture.
Mais d’autres maladies, comme des dysfonctionnements hormonaux, peuvent engendrer une augmentation de l’appétit ou déréguler la prise alimentaire.
Je vous recommande donc avant toute chose d'investiguer au niveau médical, et ce d’autant plus si votre chat s’est mis à manger autre chose que sa nourriture du jour au lendemain, ou que ce comportement s’est intensifié sans raison apparente. Des examens pourront être réalisés si besoins, et permettront d’effectuer un diagnostic et de le soigner si cela s’avère nécessaire.
2. La faim et les rations déséquilibrées
La faim est bien souvent la première cause qui peut pousser votre chat à aller chercher de la nourriture ailleurs que dans sa gamelle, et ce pour plusieurs raisons :
Les quantités proposées ne sont pas suffisantes pour combler son besoin énergétique quotidien.
Si votre chat est rationné, il est possible que les doses que vous lui donnez soient insuffisantes. Les informations quantitatives indiquées sur les paquets de croquettes ou les sachets de pâtée peuvent servir de lignes directrices, mais ne sont pas toujours précises ou pertinentes, car beaucoup de facteurs individuels liés à votre chat sont à prendre en compte : son état de santé, son âge, son poids, son niveau d’activité (et notamment le fait qu’il ait ou non un accès à l’extérieur), mais aussi son fonctionnement métabolique propre. Il peut être pertinent de demander l'avis de votre vétérinaire pour proposer un dosage adapté au besoin énergétique de votre chat.
Il arrive également que les propriétaires de chats décident de réduire subitement la quantité de croquettes ou de pâtée parce qu’ils trouvent leur chat trop gros : il est certes promordial de ne pas laisser un surpoids s’installer, car il en va de la santé de votre chat ; mais attention, se contenter de diminuer la dose de nourriture sans autres mesures peut générer beaucoup de frustration et même avoir un effet contre-productif !
Toutefois, je vous rassure, il existe dans ce genre de cas des pistes de résolution efficaces pour faire perdre du poids à votre chat en générant un minimum de frustration. Compostion de la ration, contrôle de l'apport énergétique par rapport aux besoins de votre chat, modalités de distribution alimentaire, amélioration de la satiété, mise en place de nourriture humide... Un plan d'action global prenant en compte différents paramètres pourra être mené, parfois conjointement avec un nutritionniste d'une part, et un comportementaliste d'autre part.
Les repas sont trop peu nombreux et trop espacés dans la journée.
Le chat a tendance à manger plusieurs petits repas par jour. Cela est dû à la taille naturelle de ses proies : prédateur solitaire, le chat ne se nourrit pas de grands animaux comme peuvent le faire d’autres espèces qui chassent en groupe, comme le lion ou le loup. Petits rongeurs, oiseaux, insectes, reptiles… Le chat ingère généralement de faibles quantités à chaque repas – une souris apporte par exemple environ 30 kcal d’énergie métabolisable, le chat devra donc en consommer 8 à 12 par jour pour couvrir ses besoins.
Dès lors, nourrir le chat en 1 ou 2 repas sur la journée, comme c’est parfois le cas, n’est pas adapté à son comportement alimentaire. Cela vaut notamment s'il est nourri aux croquettes, car il aura tendance dans ce cas à faire de multiples encas dans la journée – d'autres types de régime peuvent néanmoins nécessiter moins de repas, par exemple s'il est nourri au cru ou avec des proies.
Le chat ne mange pas à sa faim car d’autres chats mangent sa part.
Si vous avez plusieurs chats à la maison, sachez qu’il n’est pas rare que certains mangent plus que d’autres, et aient tendance à ingérer une bonne partie de la nourriture disponible au détriment des autres – et il se peut qu'on ne le remarque pas toujours. Un chat moins motivé, plus inhibé, pourrait ainsi laisser son ou ses congénère(s) monopoliser sa gamelle, et donc ne pas manger à sa faim.
Sa nourriture ne lui apporte pas les éléments nutritionnels dont il a besoin.
Si la nourriture industrielle que vous donnez à votre chat est de mauvaise qualité, il se peut qu'elle ne contienne pas tous les nutriments, vitamines et minéraux qui lui sont essentiels.
Il en est de même si vous lui proposez une ration faite maison, et que la recette n’est pas équilibrée. Il est en effet essentiel de se faire accompagner par un professionnel en nutrition pour apporter les compléments nécessaires à la ration et être sûr que la nourriture que vous lui donnez au quotidien, aussi qualitative et fraîche soit-elle, lui apporte bien tout ce dont il a besoin – en fonction de son âge, de son niveau d’activité, de son poids, etc.
Outre le fait qu’une ration déséquilibrée peut générer des carences alimentaires sur le long terme et donc impacter sa santé, cela peut inciter le chat à chercher instinctivement de quoi combler ses besoins nutritionnels à travers toutes les formes de nourriture qu’il peut trouver.
Le chat n’apprécie pas vraiment sa nourriture.
Au-delà des éléments évoqués ci-dessus, il est aussi possible que la nourriture que vous proposez à votre chat ne lui plaise tout simplement pas au niveau gustatif. Même si vous le voyez manger ses croquettes, cela ne veut pas dire pour autant qu’il les apprécie particulièrement.
Le meilleur moyen pour savoir si les croquettes de votre chat lui plaisent vraiment est de lui en proposer de différentes sortes, et de voir s’il mange plus une référence qu’une autre.
Il en est de même pour la nourriture humide : si votre petit félin n’accourt pas quand vous lui servez sa pâtée, ou qu’il en laisse bien souvent une bonne partie dans sa gamelle, c’est peut-être parce qu’il ne l’aime pas plus que ça… Là encore, lui proposer différents goûts et textures permettra d’identifier ses préférences et de trouver ce qui lui convient.
3. Le chat a connu la faim par le passé
Si vous avez adopté un chaton élevé dans de mauvaises conditions qui ne lui permettaient pas d’avoir accès sereinement à sa part de nourriture, ou recueilli un chat errant qui n’a peut-être pas toujours pu manger à sa faim, votre petit compagnon pourra avoir développé par instinct de survie une tendance à saisir chaque opportunité de se nourrir.
Même si le chat est aujourd’hui rassasié par les repas qui lui sont servis, il n’est pas rare qu’il garde cette habitude, une frustration alimentaire forte et répétée pouvant avoir un fort impact sur le comportement alimentaire, parfois sur le long terme. Mais je vous rassure, il est dans la plupart des cas possible de lui apprendre à se réguler et de travailler à apaiser son rapport à la nourriture.
4. Le renforcement par l’humain
Il est aussi possible que votre chat ait pris l’habitude de manger de la nourriture qui ne lui est pas destinée parce que vous lui en avez-vous-même donné à un moment, ou que vous lui en donnez encore régulièrement. S’il a été conditionné à recevoir des aliments alors que vous êtes à table, ou quelques restes après votre dîner, il est normal qu’il soit alors potentiellement plus tenté de venir voir ce qui se passe dans vos assiettes. Votre chat peut d’autant moins comprendre que cette nourriture lui est «interdite» alors que vous avez contribué à banaliser le fait qu’il y ait parfois droit… lui donnant par là-même le goût pour de nouveaux aliments qu’il n’avait pas forcément l’occasion de manger.
Il est également possible que votre chat recherche en réalité votre attention lorsqu’il vient se servir dans votre assiette : si, lorsqu’il adopte ce comportement, vous allez lui servir à manger dans sa gamelle, vous lui sortez un jouet pour faire diversion, ou le prenez dans vos bras avant de le descendre de la table en lui faisant un petit câlin au passage, vous avez sans doute sans le vouloir renforcer le comportement en donnant à votre chat quelque chose de positif.
5. L’ennui
Le fait de venir prendre de la nourriture dans la cuisine ou sur la table pendant votre dîner peut enfin être tout simplement pour le chat un moyen de s’occuper.
S’il est seul de nombreuses heures chaque jour, qu’il vit en captivité sans possibilité de sortir, qu’il n’est pas suffisamment stimulé, il est possible qu’il cherche par là une forme d’interaction avec ses humains.
Un chat qui évolue dans un environnement appauvri qui ne lui permet pas de satisfaire ses besoins en termes de dépense physique et mentale peut en effet ressentir un certain mal-être, parfois important, et toute occupation est alors bonne à prendre pour s’adapter et pallier à cette frustration. Le fait d’être coursé partout dans la maison peut par exemple dans ce contexte constituer en soi une activité ludique, même si elle peut parfois être négative lorsqu’il est réprimandé ou puni. C’est alors finalement plus votre réaction que la nourriture, qu’il n’ingère même pas toujours, et l’animation que ça représente, qui le motivent à adopter ce comportement.
Comment éviter que votre chat mange autre chose que sa nourriture ?
Vous l'aurez compris, la première chose à faire est d'identifier la cause qui pousse votre chat à chercher de la nourriture ailleurs que dans sa gamelle, et de s'assurer notamment que tous ses besoins alimentaires soient comblés, que ça soit en termes nutritifs et quantitatifs, ou au niveau des modalités de distribution alimentaire.
En cas de foyer multi-chats, et si certains de vos compagnons ont tendance à manger la part de leurs congénères, pensez à mettre en place des gamelles à puce permettant à chacun d'accéder uniquement à sa nourriture.
N'hésitez pas par ailleurs à proposer de la variété à votre chat et à lui offrir de temps en temps de nouveaux aliments, goûts et parfums, afin de lui apporter du plaisir : nos chats aussi apprécient un peu de changement dans leur assiette !
Si un comportement de recherche excessive de nourriture est installé depuis longtemps, ou que vous n'arrivez pas à en identifier la cause, le mieux est alors de vous faire accompagner de manière personnalisée pour comprendre ce qui se joue pour votre chat et de mettre en place un plan d'action adapté à sa situation.
En attendant, par sécurité, évitez toute tentation et rangez la nourriture hors d'accès, surtout les aliments potentiellement dangereux qui pourraient intoxiquer votre chat.
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